À propos de l'étude

Ce texte de vulgarisation résume l’article d’Alain Bélanger et Guillaume Marois, « Vieillissement de la population dans la région métropolitaine de Montréal : perspectives démographiques locales » publié en 2015 dans Cahiers québécois de démographie, vol. 44, no 1, p. 129-149.

  • Faits saillants

  • En 2031, une personne sur cinq aura 65 ans ou plus sur le territoire de la Communauté métropolitaine de Montréal.
  • Les aînés seront particulièrement nombreux dans les quartiers centraux de l’île de Montréal et dans les vieilles banlieues.
  • Les banlieues, qui se sont développées autour des jeunes familles, devront relever de grands défis pour s’adapter aux besoins des personnes âgées.

On connait la chanson : l’Occident se fait de plus en plus vieux, et le Québec n’y échappe pas. Le portrait de ce « papy-boom[1] » demeure cependant incomplet. À quoi ressemblera-t-il à l’échelle du Grand Montréal? Les municipalités qui composent la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM)[2] connaîtront-elles des scénarios similaires? Les projections démographiques indiquent plutôt de grands écarts entre les territoires. Ainsi, la proportion de personnes âgées croîtra dans certaines municipalités, mais se stabilisera dans d’autres, avec des différences marquantes entre certains secteurs sur l’île et les banlieues.

Pour en arriver à ces constats, Alain Bélanger, professeur de démographie à l’INRS-UCS, et Guillaume Marois, doctorant de la même université, ont analysé les données produites par un nouveau modèle de projection démographique : le Local Demographic Simulations (LDS). Les deux démographes ont ainsi pu brosser un portrait plus précis de la mobilité interne pour le Grand Montréal. Leur objectif : prédire quelles municipalités devront se préparer à répondre aux besoins d’une population âgée en 2031.

« LDS est un modèle de projection démographique conçu pour les [82] municipalités de la Communauté métropolitaine de Montréal. Il s’agit d’un modèle de projection par microsimulation basé sur le temps. Sa population de départ est tirée du fichier de microdonnées du recensement de 2006 (questionnaire détaillé) […]. »

Des municipalités qui vieillissent à différentes vitesses

Selon cette simulation, en 2031, une personne sur cinq sur le territoire de la CMM sera âgée de 65 ans et plus. Cependant, cette proportion variera grandement d’une municipalité à l’autre, oscillant entre 12,5 % (Les Cèdres) et 39,7 % (Côte-Saint-Luc). On retrouve les projections les plus élevées dans certaines municipalités de l’île de Montréal (Côte-Saint-Luc, Pointe-Claire, Westmount, Montréal-Est), mais aussi en banlieue (Saint-Lambert, Rosemère, Repentigny).

Les auteurs fournissent deux explications. Premièrement, ces municipalités ont un très faible potentiel de développement supplémentaire : le lotissement résidentiel a atteint sa capacité maximale. Deuxièmement, la population qui compose ces municipalités est peu mobile. Comme l’expliquent les démographes, « [la population] vieillit sur place et laisse peu de logements pour les nouvelles familles de l’extérieur qui désireraient s’y installer ».

À l’opposé, les municipalités qui connaissent un grand potentiel de lotissement affichent les proportions de personnes âgées les plus faibles. L’arrivée de nombreuses jeunes familles compense le vieillissement de la population. Il s’agit surtout des nouvelles banlieues situées en périphérie de la CMM.

Une forte croissance du nombre de personnes âgées

Les démographes analysent aussi le taux de croissance de la population d’aînés dans les différentes localités du Grand Montréal. Au total, le nombre d’aînés sur le territoire bondira de 71 % d’ici 2031. Encore une fois, on constate des écarts importants entre les municipalités. L’exemple de Mirabel est parlant. Avec son fort potentiel de lotissement, de nombreuses jeunes familles s’y installent, ce qui neutralise, en quelque sorte, l’augmentation du nombre d’aînés. Mais, malgré la faible proportion des 65 ans et plus (17,6 %), le nombre réel d’aînés augmentera néanmoins de 228 %!

Lorsqu’on observe les projections, on remarque que « plus on s’éloigne de la ville centre, plus le taux de croissance de la population âgée […] de la municipalité tend à être élevé ». Des nouvelles banlieues vieillissantes? Comment expliquer ces écarts de croissance entre les banlieues et la ville, et entre les banlieues elles-mêmes? Par le choix de nombreuses familles, dont les parents ont aujourd’hui entre 25 et 59 ans, de s’installer dans des secteurs en développement.

« C’est essentiellement en banlieue que l’on retrouve les plus fortes croissances des effectifs des 65 ans et plus, et plus particulièrement encore dans les nouvelles banlieues où il y a un fort potentiel de lotissement résidentiel. […] Ces municipalités […] attirent principalement les familles. Cependant, les parents de ces familles vieilliront sur place, faisant croître subséquemment le nombre de personnes âgées. »

Une banlieue qui devra s’adapter

Le vieillissement de la population occupe le discours public, encore faut-il s’y préparer afin de répondre aux besoins des aînés de demain. Les banlieues, qui accueillent aujourd’hui de jeunes familles, connaîtront la plus forte augmentation de la population d’aînés et ont tout particulièrement intérêt à planifier l’avenir. C’est d’autant plus important que, comme le soulignent Marois et Bélanger, « les services aux personnes âgées sont offerts au niveau local ». Plusieurs municipalités de banlieue ont été pensées en fonction du transport automobile, ce qui convient aux jeunes familles, mais peut être beaucoup moins adapté aux réalités des personnes âgées. La disponibilité du transport collectif, la proximité des centres de santé, la distance entre le domicile des aînés et les commerces essentiels (épiceries, pharmacies, etc.) sont autant de défis qui attendent les municipalités en périphérie du Grand Montréal.

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[1] L’expression « papy boom » est tirée de l’article de Martel et Légaré, « Après le baby-boom, le papy-boom : regards démographiques sur une nouvelle vieillesse », Le Gérontophile, vol. 7, no 2 (1995), p. 26-32.

[2] Statistique Canada découpe la Communauté métropolitaine de Montréal en 82 zones qui forment le Grand Montréal. Les auteurs utilisent ce même découpage à l’exception de trois municipalités (Calixa-Lavallée, l’Île-Dorval et l’Île-Cadieux) qui ont été fusionnées à des municipalités adjacentes.