La paternité… Que ce soit en lien avec l’implication au quotidien, l’utilisation du congé parental ou la reproduction assistée, le sujet a été abordé sous une multitude d’angles. Mais, qu’en est-il de la réalité des grands-pères? Très peu discutée, la grand-parentalité au masculin n’est pourtant pas sans effet sur les dynamiques familiales. Alors, commençons par le commencement… Comment les grands-pères vivent-ils leur grand-parentalité?
C’est ce que tentent de comprendre des chercheurs et une chercheuse de l’Université du Québec à Chicoutimi, en collaboration avec l’Association des retraitées et retraités de l’éducation et des autres services publics du Québec (AREQ-CSQ) et la Table régionale de concertation des aînés du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Parmi les 60 000 membres de l’Association des retraitées et retraités de l’éducation et des autres services publics du Québec (AREQ), ce sont 323 grands-pères âgés de 50 ans et plus qui ont répondu à l’enquête par questionnaire sur la grand-parentalité au masculin au printemps 2021 durant la troisième vague de la COVID-19.
Grand-papa, raconte-moi ton histoire
S’ils présentent bien quelques similitudes, tous les grands-pères sont loin d’être identiques! Ceux interrogés dans le cadre de cette étude sont comparables aux grands-papas issus de la population générale sur le plan du statut matrimonial et de la composition de leur ménage. Toutefois, ils se distinguent par le fait qu’ils occupaient tous un emploi dans les secteurs de l’éducation et des autres services publics avant leur retraite. Si bien que près de 94 % d’entre eux détiennent un diplôme universitaire comparativement à 20 % chez la population générale des hommes âgés de 65 ans et plus au Québec. Malgré ces différences, leurs histoires offrent tout de même de premières pistes d’informations intéressantes quant au vécu de la grand-parentalité au masculin au Québec.
Sans petits-enfants, un grand-père n’est point
À la blague, certains lancent qu’« être grand-père, c’est exactement comme être père, mais avec les inconvénients en moins! ». Que veulent-ils dire par là? Que les rôles de médiateur et de figure disciplinaire autrefois associés au grand-père dans les familles québécoises se retrouvent aujourd’hui au bas de l’échelle des priorités. Au contraire, les grands-pères interrogés se reconnaissent davantage dans les gestes d’encouragement et de soutien ainsi que dans les démonstrations d’affection qu’ils peuvent prodiguer. Ils cherchent avant tout à ce que leurs petits-enfants se sentent aimés et appréciés. De moindre importance, mais toujours priorisé, ils souhaitent également être amusants et… transmettre leurs savoirs et leurs connaissances. Pourquoi? Leur profession déteindrait sur leur désir d’éduquer.
Y a-t-il des obstacles dans la réalisation de ces rôles auprès de leurs petits-enfants? Quatre principaux défis sont rapportés par les grands-pères : la distance géographique (63 %), le manque de disponibilité de leurs enfants (41 %) ou petits-enfants (38 %), l’absence d’intérêt de leurs enfants (20 %) ou petits-enfants (25 %), et les dynamiques familiales difficiles (20 %), dont des conflits avec leurs gendres, brus (15 %) ou enfants (8 %). Les grands-pères vivant seuls sont plus nombreux à rapporter une dynamique familiale difficile et une absence d’intérêt de leurs enfants ou de leurs petits-enfants. Ceux ayant des dynamiques familiales difficiles sont plus nombreux à rapporter une absence de disponibilité et d’intérêts des enfants et petits-enfants.
Des services de soutien pour la grand-parentalité au masculin : oui ou non?
Des services de soutien personnalisés en lien avec la grand-parentalité? « Non merci! » semble à première vue être la réponse d’une majorité de grands-pères de cette étude. Ce constat résonne avec l’importance qu’accordent, en général, les hommes à l’autonomie individuelle et le peu d’enthousiasme envers les services de soutien. Pourtant, bon nombre de grands-pères jugent pertinents les témoignages, la valorisation de leur rôle ou la documentation scientifique sur la grand-parentalité offerts par leur association de retraité·e·s. Ce sont les grands-pères aux prises avec des dynamiques familiales difficiles en raison de conflits avec leurs enfants, gendres ou brus qui expriment la plus grande ouverture aux services de soutien offerts par leur association. Certes, il y a autant de besoins qu’il y a de grands-pères.
Naviguer la grand-parentalité au masculin
La transformation du rôle du grand-père fait écho à l’évolution de la paternité ces dernières années au Québec. Malheureusement, les appréhensions des grands-pères face aux services pouvant les soutenir dans ce rôle restent tenaces… Considérant l’enthousiasme plus marqué des grands-pères interrogés envers les regroupements associatifs, ces derniers pourraient être une porte d’entrée plus directe vers des services de soutien ou d’information. Et de fil en aiguille, ces services pourraient devenir un réflexe dans la navigation de la grand-parentalité au masculin. Toujours est-il que cette étude, unique en son genre, mériterait une suite sur un échantillon diversifié afin de démystifier les différentes facettes de la grand-parentalité au masculin au Québec.